Beaucoup d’investisseurs (une part non négligeable, dira-t-on) oublient ou ne savent pas demander un différé d’emprunt lors de la phase de négociation de prêt, alors que celui-ci peut s’avérer très utile dans leur situation.
Pourquoi demander un différé ?
Le problème principal auquel répond l’usage du différé d’emprunt est celui de l’impossibilité d’exploiter votre bien immobilier directement à la suite de son acquisition – que ce soit pour y habiter ou pour le louer. Souvent, cela sera lié à de la construction ou à des travaux. On se retrouve donc dans une situation où la banque a débloqué des fonds ; de votre côté, vous avez donc des échéances à rembourser, mais comme vous ne pouvez pas encore exploiter votre achat, cela vous met en difficulté financière. C’est à-dire que si c’est un achat locatif, vous n’avez pas les loyers qui compensent le prêt ; et si l’achat est une résidence pour vous, pas possible d’y habiter pour l’instant, ce qui vous oblige à payer un loyer autre part.
Ce que se propose de faire la banque pour vous arranger pendant cette période, c’est de retarder le début du remboursement du capital emprunté, et parfois des intérêts, sur une période déterminée appelée "période de différé". Pendant cette période, selon le type de différé choisi, l'emprunteur peut être amené à ne rembourser que les intérêts (différé partiel) ou à ne rien rembourser du tout (différé total). Comme rien n’est gratuit, les intérêts non payés durant la période de différé s’ajoutent au capital restant dû, augmentant ainsi le montant total des intérêts à payer sur la durée du prêt.
Variantes et types de différé
Il existe principalement deux types de différé d'emprunt :
- Différé partiel : on parle aussi de « différé d’amortissement », mais cela veut simplement dire qu’on ne rembourse pas le capital sur une période donnée. La banque débloque des fonds, vous payez donc des intérêts proportionnels au montant débloqué.
- Différé total : vous ne voulez absolument rien payer : la banque débloque des fonds, vous devriez payer des intérêts proportionnels à la somme débloquée, mais vous ne le faites pas. À la place, vous ajoutez ces intérêts dus à votre “facture”. C’est comme si la banque vous faisait un emprunt sur ces intérêts dus. Dans les faits, elle va rajouter ces intérêts à votre capital dû total.
Exemple de calcul
Par exemple, prenons le cas d’un emprunt de 100 000 euros sur 20 ans à un taux de 3 %.
On obtient avec cette formule un échéance mensuelle de 555 euros, qui va comprendre une partie de paiement d’intérêts, et une partie de remboursement (ou amortissement) du capital.
Si l’on fait la somme de toutes les échéances à payer sur les 20 ans, on obtient 133 103 euros.
Maintenant, si on applique un différé partiel de 2 ans (24 mois), on ne va pas inclure la partie remboursement du capital dans l’échéance mensuelle pendant toute la période du différé. Cela va donc réduire la mensualité, et pendant les deux premières années, seulement les intérêts d’emprunts seront à payer.
On aura donc uniquement 250 euros à payer pendant 2 ans, puis les 580 euros selon la formule classique ensuite.
Si l’on fait la somme de toutes les échéances à emprunter sur les 20 ans, on obtient 139 103 euros.
On voit donc qu’avec un différé partiel de 24 mois, le prêt coûte plus cher, car le capital met plus de temps à être remboursé.
Prenons maintenant l’exemple du différé total de 24 mois. Pendant 2 ans, ni intérêts ni amortissement ne seront payés. Cela fera donc une échéance nulle (à l’exception de l’assurance emprunteur, non ajoutée dans le calcul).
Ceci étant dit, comme un capital a été emprunté, des intérêts sont dus mensuellement, et si ces intérêts ne sont pas payés pendant le différé, c’est comme s’ils étaient également “empruntés”.
lls viennent donc s’ajouter au capital emprunté.Dans notre exemple, les intérêts annuels à payer sont de 3 % × 100 000 euros, soit 3000 euros par an. Au bout de deux ans de différé, les 3000 euros × 2 ans = 6000 euros sont donc ajoutés au capital dû.
On doit donc à la banque 106 000 euros.À partir de là, la formule du prêt amortissable sur 20 ans nous donne 588 euros à payer mensuellement après le différé total. Si l’on fait la somme de toutes les échéances à payer sur les 20 ans, on obtient 141 090 euros.
On voit donc qu’avec un différé total de 24 mois, le prêt coûte plus cher que dans les deux autres cas, car non seulement le prêt met plus de temps à être remboursé, mais en plus les intérêts des deux premières années viennent s’ajouter au capital restant dû.
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Utilisation
Cet outil financier est utilisé pour les achats sur plans (VEFA), qui sont des projets pouvant durer de longues années. Mais dans les faits, ce procédé est aussi “contourné” par des investisseurs qui n’ont pas besoin de différer leurs échéances.
Par exemple, il est courant qu’un investisseur locatif pouvant directement exploiter son bien demande tout de même un différé de 2 ans, pour augmenter ses flux de trésorerie sur le début de son activité. Il touche donc sur ces premiers mois ses loyers sans rembourser des échéances complètes. Il récupère donc au fur et à mesure une trésorerie qu’il va pouvoir allouer autre part (par exemple en apport pour un autre projet ou autre type d’investissement). Évidemment, il ne s’agit pas de demander un différé simplement pour le plaisir : celui-ci a un coût, il faut donc que votre excédent de trésorerie soit investi dans l’optique d’avoir un retour supérieur à ces coûts.
Négociation auprès des banques
De manière générale, il faudra justifier votre demande de différé partiel ou total. Certaines banques seront plus souples que d’autres, mais il faudra forcément fournir un devis de travaux justifiant l’impossibilité d’exploiter le bien sur une certaine durée (cette durée de toute évidence sera sujet à interprétation !).
Profil idéal pour le différé :
- Vous achetez votre résidence principale , mais vous avez prévu des travaux de plusieurs mois pendant lesquels vous devrez encore résider dans votre location.
- Vous achetez un logement à but locatif, mais vous avez prévu des travaux de plusieurs mois pendant lesquels vous ne pourrez pas louer votre bien et toucher vos loyers.
- Vous souhaitez exploiter votre projet immobilier sans rembourser vos échéances sur une certaine durée, afin de vous constituer une réserve de trésorerie.